HARCÈLEMENT SCOLAIRE : RÉFLEXION POUR LA PROTECTION DE TOUS.

Le verbe « harceler » provient de « herseler » en ancien français, terme diminutif de « herser », apparu au XIIe siècle et signifiant « tourmenter, malmener », comme la herse tourmente et malmène la terre. Le mot devient, au XVIIe siècle « harceler » et prend le sens de « soumettre sans répit à de petites attaques ». 

Nous le savons toutes et tous, le harcèlement n’existe pas que dans le cadre scolaire : harcèlement moral (au sein des couples, des familles, du travail, etc.), sexuel, cyber depuis peu (Internet est officiellement né le 12 mars 1989). Cette tendance odieuse, moralement blâmable, fait partie de notre condition humaine bien que nous fassions toutes et tous comme si nous n’étions pas fait de ce bois-là. Il va sans dire que tout le monde n’a pas participé à des cabales contre X ou Y, tout simplement parce qu’un certain nombre d’entre nous a eu la chance d’avoir des parents qui lui ont inculqué des valeurs humanistes ; et cela n’a rien à voir avec la classe sociale.

Parce que le monde des enfants est toujours révélateur de celui des adultes (bien que ceux-ci se posent souvent en donneurs de leçons) - et que c’est un sujet plus que jamais d’actualité - je vais rester focalisée, pour ce blabla, sur le harcèlement scolaire. 

Les premières définitions de ce type de harcèlement sont proposées dans les années 1970 (grand cru  #JoyeuxAnniversaireLaflote) par deux psychologues scandinaves, A. Pikas et D. Olweus. C’est celle de ce dernier qui fait aujourd’hui consensus : « Un élève est victime de harcèlement lorsqu'il est exposé de manière répétée et à long terme, à des actions négatives de la part d’un ou plusieurs élèves. » Les rapports sociaux entre humains – comme entre tout êtres vivants – sont faits de moments sereins, agréables, sympas, physiques ou psychologiques mais ils sont aussi faits d’affrontements, de heurts, de blessures, physiques ou psychologiques. C’est déjà le cas en chacun d’entre nous, individuellement : la lutte interne pour maintenir – ou tenter de – un équilibre est quotidienne. 

Or, dans mon métier, je constate que dès qu’un gosse se fait emmerder/clasher/bousculer par un ou plusieurs autres, les adultes ont vite fait de brandir le mot « harcèlement » ; les enfants/ados aussi signalent des cas de harcèlement plus vite qu’il ne leur faut pour dire « Wesh ». Globalement, quand on finit par faire le tri dans tout ce merdier, on s’occupe de la victime, et c’est bien normal, mais la seule réponse que l’on propose au(x) harceleur(s) – sachant qu’il est assez rare qu’un collégien/lycéen harcèle seul – est de nature répressive. Le gamin, âgé de quatorze ans, interpelé en ce mois de septembre 2023 par cinq policiers (!!!) en plein cours, puis sorti du collège menotté, en est un exemple des plus excessifs (et scandaleux). Mais enfin, comment des adultes peuvent-ils réagir de la sorte ? Comment personne (enfin si peu de gens) ne se dit que si un jeune, leader d’un groupe de suiveurs, se laisse aller à prendre un de ses pairs pour cible, c’est que lui-même doit très probablement être dans un état psychologique pas vraiment top (mettons de côté les gamins de structure psychique de types « pervers » ou « paranoïaque ») ? Conseil de discipline, exclusion temporaire ou définitive sont-ils vraiment la solution pour endiguer le phénomène du harcèlement scolaire, dont l’existence est concomitante de l’invention de l’École mais qui, avec l’avènement des réseaux sociaux, a pris une ampleur délirante et, parfois hélas, funeste. 

S’il faut sans aucun doute prendre soin des victimes, il me semble tout aussi important de prendre soin de ces jeunes qui revêtent l’habit du bourreau. Le hic, c’est que cela demanderait du temps, des formations pour l’ensemble des adultes qui travaillent, ou amenés à travailler, dans les établissements, des psychologues, des infirmiers-ières (en France, c’est plutôt de l’ordre d’un ou deux jours de présence par semaine !), des éducateurs-trices spécialisé(e)s (il n’y en a pas à ce jour dans les établissements scolaires lambdas en France) sur zone tous les jours, bref cela demanderait des moyens autrement plus conséquents que ceux alloués jusqu’à présent. Et cela éviterait d’avoir recours à des mesures à la va-comme-je-te-pousse (sans mauvais jeu de mots compte tenu du sujet) qui ne vont qu’engorger encore plus l’institution judiciaire qui n’a vraiment pas besoin de cela.

Lutter contre le harcèlement scolaire, c’est accepter que le jour où il disparaîtra n’est pas pour demain matin tout en mettant tout en œuvre pour accompagner victimes et bourreaux dans la compréhension du pourquoi/comment Ils en sont arrivés là. Lutter contre le harcèlement scolaire, c’est se souvenir que les enfants/ados ne sont pas autre chose que ce qu’ils sont - des êtres en construction - et c’est aussi, pour les adultes, se regarder un peu plus longuement dans le miroir en se demandant si nos enfants ne reproduiraient pas des comportements dont nous ne sommes pas exempts. Un peu comme quand on donne une tape à un enfant en lui disant qu’il ne faut pas taper son frère, sa sœur ou tout autre gamin qui est différent de lui. Si ce blabla venait à être publié, voyons si je vais me faire harceler…  

FRAGMENTS SENSIBLES ET NON DOGMATIQUES

Par Laflote Sistoux

Bonjour,

j'ai exercé les métiers de journaliste-casteuse TV, d'assistante d'édition, d'attachée de presse politique, de conceptrice-rédactrice avant de passer, à quarante-six ans, le Capes de Lettres modernes et devenir Professeure de Français.

Par ailleurs, je suis auteure. J'ai publié trois livres Jeunesse : deux chez Folio Junior (1998) et un chez Gründ (2014).

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