Écriture inclusive et expressions telles que « Du coup », « De base », « Genre » (vous voyez de quoi je cause...) peuvent écorcher les yeux et les oreilles, parfois au sang quand elles prennent place dans des phrases à la syntaxe extra-terrestre (cf production écrite d'une grande majorité de gosses) en tout cas elles déchaînent des passions.
Et si on se calmait, on écoutait, on réfléchissait pour jouer chacun sa partition (pour certains la cacophonie sert au moins à vouloir qu’elle cesse, pour d’autres elle est mélodie) en gardant à l’esprit que c’est le trio Temps/Espace/Langue qui décidera de la musique de nos bouches, et non seuls les Politiques ou le Peuple. Pour celles et ceux qui n’iraient pas plus loin dans la lecture de ce bla-bla, je ne saurais trop vous encourager à mater la vidéo (de cinq minutes… une éternité aujourd’hui, il n’y a pas si longtemps si court) se trouvant au bout du lien ci-après entre parenthèses (https://www.youtube.com/watch?v=CNhfmBxUwdc) : Tristan Garcia (écrivain et philosophe) y incarne ce calme, cette écoute, cette réflexion qui permettent de comprendre que « pour » comme « contre » ont un rôle à jouer. Ce à quoi il est nécessaire de veiller, c’est qu’il n’y ait pas de débordements - plus ou moins violents – ce qui, pour moi la première (qui peux réagir comme le chat à qui l’on retirerait un morceau de jambon sec après le lui avoir agité sous le museau), est chaud potatoes de chez caliente pommes de terre. Notre langue est vivante, elle doit rester vivace et, pour ce faire, elle a besoin – me semble-t-il – de la présence de progressistes et de conservateurs comme de celle d’autres à la capacité, pas si courante, de faire exister les deux.
VIVANT (Le Robert) : adjectif et nom masculin // 1. Qui vit, est en vie (opposé à mort) // 2. Plein de vie.
VIVACE (Le Robert) : 1. adjectif et nom féminin (plantes, petits animaux) // Constitué de façon à résister longtemps à ce qui peut compromettre la santé ou la vie // Quo se maintient sans défaillance, qu’il est difficile de détruire // 2. adjectif invariable, adverbe e nom masculin // Musique d’un mouvement rapide, vif.
Je ne n’écrirai pas plus que cela à propos de l’écriture inclusive qui, proposée à l’usage sous sa forme « usine à gaz », me semble être vraiment à côté de la plaque, le fruit de personnes qui, sous couvert d’égalitarisme, ne font que creuser des clivages dont nous n’avons vraiment pas besoin, ni hier, ni aujourd’hui ni demain. Perso, j’écris régulièrement les deux genres « tous/toutes », « ceux/celles », « professeur(e)s », etc. mais je n’emploie pas le pronom « iel » dans la mesure où, à l’heure actuelle, il ne fait que créer une case supplémentaire au lieu de dégenrer le tout, comme le « you » angliche par exemple. Admettons - pourquoi pas d’ailleurs, je suis open comme meuf - qu’on fasse entrer dans la danse ce « iel » : qu’est-ce et qui va-t-il désigner ? (Et tout ce qui va en découler). Bref, pour l’instant, ce mot ne me semble pas prêt à l’emploi…
Pour ce qui est des expressions (qui traversent depuis toujours la langue), je l’ai déjà écrit dans un billet récemment publié ici, je l’écris à nouveau dans celui-ci : j'aime le langage des Jeunes. Eh oui, c’est souvent depuis leur position qu’entrent ces nouveautés langagières (lexicales et syntaxiques) qui, pour certaines, finissent par devenir « persona grata ». Ce langage, je le trouve créatif, drôle, vif… j’adore devoir rester sur le qui-vive et le suivre quasi minute par minute tant les mots dont il est pétri atteignent des sommets de popularité pour retomber dans l'anonymat sans que l'on sache vraiment pourquoi. Je m’étais pris une bonne remise à niveau dans les ratiches il y a cinq ou six ans en utilisant le mot « swag » devant une classe de Seconde (ça peut hyper bien fonctionner d’utiliser le vocabulaire des gosses… en général, ça les surprend et les fait marrer ; moi, ça me permet de jeter un pont mobile entre eux et ouam), alors que au cours des semaines précédentes, je l'entendais dans les couloirs du bahut : « Heu nan Madame, vous ne pouvez pas faire (à la place de « dire »… hum) ça, c’est… vieux (leur hésitation à prononcer cet adjectif avait été palpable, sans doute pour ne pas me faire de la peine – ha ha ha). »
La Grammaire (morphologie et syntaxe, pour faire court) – pas seulement en France, hein – subit chaque jour des « attaques », c’est précisément ce qui fait la vie/vivacité d’une langue vivante. Certaines de ces « attaques » finissent par atteindre leurs objectifs, d’autres finissent aux oubliettes. Il en va de même avec nos personnes, corps et esprit (qui sépare encore l’un de l’autre ?!?) : eh oui, chaque fucking jour, nous subissons des « attaques » venant du monde extérieur - comme intérieur - plus ou moins visibles et nous nous défendons, parfois sans nous en rendre compte d’ailleurs (l’hallucinante mécanique que nous sommes a des modes opératoires qui échappent, pour certains, à notre conscience) pour que demeure une colonne vertébrale, un je-ne-sais-quoi qui fait que je suis « moi », reconnaissable par moi-même et par les autres. Et pourtant, parce que je suis vivant, je ne suis « jamais ni tout à fait le/la même ni tout à fait un(e) autre » (poke Paul Verlaine, « Mon Rêve familier », 1866).
Ce qui me semble terrible dans la présence starifiée des « du coup », « de base » et autre « askip , c’est leur utilisation massive, sans nuance, et au règne sans partage vis à vis d'autres mots/expressions qu'il serait bon (#Euphémisme) que les jeunes connaissent et emploient, histoire d'entretenir la souplesse de leurs cervelles et la capacité à voir le monde sous moult angles différents. Ils ont toujours eu leur langage à eux (moi en mon temps, comme les autres), mais – et c'est ce que je leur explique – il est nécessaire qu'ils aient et maîtrisent les outils (au sens large) de la langue COMMUNE. Et, aujourd'hui plus que jamais, étant donné le chaos qui règne à l'École (et dans les têtes des gosses), c'est moyennement bien parti ; mais pas comme il y a une trentaine d'années, non, on est monté sur la marche du dessus. Ce serait super de s'en rendre compte (ça commence, mollement) et surtout, plutôt que de s’agacer sur ces histoires de point médian et autres ielisations, de trouver comment endiguer le torrent qui emporte « nos » jeunes vers un appauvrissement cérébral (émotionnel, intellectuel, psychique, etc.) qui pourrait bien coûter cher à nous tous et toutes. À mes yeux, LA lutte à mener est de faire émerger, grandir et partager ce que porte en elle de plus noble notre humanité.
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